Je n’écrirai plus jamais !

Coeur brisé
Nous sommes installées dans sa cuisine. Sur la table, elle a étalé des photos. Quelques souvenirs de jeunesse. De ses premiers émois amoureux. De son frère aîné.

Pensivement, elle regarde une photo qui représente un groupe de jeunes hommes rieurs brandissant qui une bouteille de vin, qui un verre, qui sa casquette… Ils sont une quinzaine. Le jour de la conscription. C’est la classe 1944.

Parmi eux, son frère. Debout, au dernier rang. Mais ce n’est pas lui qu’elle me montre.

Celui qui retient son attention est accroupi au premier rang. Il porte un blouson en cuir, sans doute inhabituel dans ce petit coin de France rurale, un foulard élégamment noué autour du cou. Ses cheveux foncés ondulent vers l’arrière, ses yeux moqueurs fixent fièrement l’objectif.

Aujourd’hui, on dirait de lui que c’est un beau gosse. Séduisant. Sans doute séducteur.

Son premier amour, en tout cas.

« C’était un copain d’André ; on s’échangeait des lettres… »

Ces dernières étaient précieusement conservées et dissimulées dans une boîte en carton, sous son lit. Avec son journal intime.

« J’écrivais beaucoup, à cette époque-là ! »

Elle avait dix-sept ans. Et puis un jour… Un jour, elle s’est rendu compte que sa mère avait fouillé dans la boîte. Elle était comme cela, sa mère : inquisitrice, sévère, colérique. Parfois violente. En paroles, en tout cas.

« J’ai tout brûlé ! Les lettres, le journal… et je me suis dit : je n’écrirai plus jamais ! »

Elle avait trop peur que sa mère puisse lire au fond de son cœur.

Quant à cet amour de jeunesse, il n’a pas duré. Le jeune homme jouait les casse-cous sur sa moto ; il était trop exubérant pour elle, tellement discrète. Il me semble tout de même que quelque chose s’agite au fond d’elle-même lorsqu’elle regarde son visage sur la photo. Ses rêves de jeune fille ?

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5 réflexions au sujet de « Je n’écrirai plus jamais ! »

    1. Bonsoir Patricia,

      Sur le coup, je n’ai même pas réalisé… Il est tellement invraisemblable que je puisse prononcer une phrase pareille ! C’est en relisant, après publication, que j’ai vu l’ambigüité ^^

      Florence

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