À l’abri (10)

Cette histoire a commencé ici.

Bagarre dans l'abri

Blade prend son temps avant de me répondre.

— En fait, nous avons été très surpris, mais personne n’est sorti. En tout cas, pas tant que nous avons simulé les émissions de la radio nationale. Après…

— Après, j’ai été recruté, intervient Toad.

— Vous avez tous commencé à vous entretuer, ajoute Blade.

Une nouvelle fois, le vertige me gagne. Combien de vies perdues pour rien ? Pour cette fichue expérience ? J’imagine les scènes qui ont eu lieu dans Delta Un multipliées à l’infini, sur un mur d’écrans. C’est à vomir…

Le Docteur Toad me tapote le bras.

— Votre blessure cicatrise bien. Bientôt, vous pourrez sortir.

— Et revoir le soleil ?

— Et revoir le soleil, oui.

Pour l’instant, c’est tout ce qui m’importe. Je ne veux pas en savoir plus.

Soulagé, je ferme les yeux. J’essaie de me remémorer comment c’est, dehors. La sensation de l’air libre, la chaleur du soleil, le vent qui vous soulève les cheveux… Des plaisirs tellement simples que je n’ai pas de mots pour les décrire…

Les deux compères, à mes côtés, sont d’humeur badine. Indifférents à mon silence qui se prolonge, ils discutent le bout de gras.

— Votre mission sera bientôt terminée, lance soudain Blade au docteur : il n’y aura plus de gens à soigner.

— Plus que des cadavres à enterrer ! renchérit Toad.

Je réalise tout à coup qu’il y a encore des gens dans des abris, qui sont en train de devenir fous derrière une porte qui a l’air d’être fermée mais ne l’est pas.

Et il y a des gens qui les regardent.

C’est dégueulasse !

Mais il y en a aussi qui sont sortis. Et qui profitent du soleil. Comme moi, bientôt. En tout cas, c’est ce que Toad a dit.

— Vous ne m’avez pas répondu, dis-je ; ceux qui sont sortis, qu’est-ce qu’ils sont devenus ?

— Nous les debriefons avant de leur rendre leur liberté, répond Blade. Pour savoir comment ils ont vécu l’expérience et ce qui les a poussés à ouvrir la porte. Apparemment, c’est l’arrêt des émissions de radio. Avant, personne ne touchait la porte.

Malgré moi, j’interviens.

— La porte, si ! Mais pas la poignée.

Blade s’étonne.

— Vous voulez dire que vous faisiez la différence ?

— Moi, oui. J’aimais bien caresser la porte, mais je ne touchais jamais à la poignée. D’autres évitaient carrément de la regarder. Le plus souvent, on s’en tenait à distance.

— J’ai l’impression que nous avons trouvé un indice important, lance alors Blade joyeusement. Il fallait d’abord oser toucher la porte avant de penser à essayer de l’ouvrir.

Se tournant vers moi, il prend la peine de m’expliquer :

— Dans certains abris, personne n’a encore essayé de sortir. Les gens vivent toujours normalement. Nous allons vérifier s’ils touchent la porte ou pas.

L’idée de ces portes fermées, mais finalement ouvertes, me fait frémir. Plus jamais je ne vivrai derrière une porte !

En attendant, ma nouvelle obsession, c’est le soleil.

Je sais qu’il existe toujours. On m’a dit que j’allais le revoir. Je veux le revoir ! Tout de suite !

— Calmez-vous, intervient Toad, les yeux braqués sur le moniteur qui affiche mon rythme cardiaque. Sinon, vous allez péter une durite.

Une durite ? C’est un câble, oui, que je vais péter, s’il continue avec ses blagues à deux balles…

— Je veux sortir ! Vous pouvez comprendre, ça ?

À suivre

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3 réflexions au sujet de « À l’abri (10) »

    1. Bonjour Jean-Philippe,

      C’est bien de douter : c’est comme ça qu’on avance et qu’on grandit 🙂
      À bientôt pour la suite 😉

      Florence

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