Les 15 derniers jours (15)

Cette histoire a commencé là : http://www.amotsdelies.com/blog/2012/12/les-15-derniers-jours-1/

Fleurs d'orchidées

« J’ai continué à faire des recherches sur Ambroise Doré, dit-il.

— Ah… Et… Tu as trouvé quelque chose d’intéressant ? »

Jérémy ne dit rien, mais la valse des touches du clavier a repris. Éloïse préfère se lever : dès que le nom d’Ambroise est prononcé, de quelque Ambroise qu’il s’agisse, elle ne tient plus en place.

Face à la fenêtre, elle se concentre sur sa respiration pour tenter de retrouver un minimum de calme intérieur quand la voix du jeune homme s’élève à nouveau.

« On savait déjà qu’Ambroise Doré était mort le 7 décembre 2012. Ce que j’ai découvert depuis, c’est qu’il était aussi né un 7 décembre.

— Ce qui explique son prénom. En Afrique, c’était une habitude courante de donner comme prénom à un enfant celui qui était inscrit sur le calendrier le jour de la naissance. Il y en a même qui se sont retrouvés avec Fetnat comme prénom parce qu’ils étaient nés un 14 juillet ! »

Éloïse se tait un instant. Enfin un peu de rationalité dans son univers. C’est rassurant !

Cela dit, il reste l’énigme de la ressemblance entre les deux Ambroise…

Jérémy hausse les épaules.

« On a toujours un peu de mal à discerner les différences sur des visages noirs ; on s’est peut-être trompé ! Ou alors, on a vu ce qu’on avait inconsciemment envie de voir… »

 

Dimanche 16 décembre 2012. Sainte Alice. Le dernier dimanche avant la fin du monde ?

Face à son calendrier et à sa tasse de thé, Éloïse a soudain envie de mettre le lecteur de sa vie sur pause. Un arrêt sur image, voilà ce dont elle a besoin. Savourer cette journée sans se prendre la tête. Tout oublier : les Mayas, les messagers, Ambroise…

En sortant, elle ne claque même pas la porte de son appartement. Aujourd’hui est différent ; tout doit être fait différemment. Même son voisin de palier en a l’air convaincu : c’est avec un sourire timide qu’il la gratifie d’un « Bonjour, Mademoiselle » avant même qu’elle lui ait adressé la parole. Pour un peu, elle l’embrasserait ! Sur la joue, bien sûr : il ne faut quand même pas exagérer.

Dehors, le soleil a semble-t-il décidé d’honorer cette journée de sa présence. Éloïse sourit : se préparer à disparaître sous le soleil, c’est quand même plus sympa ! Mais que faire de cette belle journée d’hiver ?

Indécise, la jeune fille se dirige malgré tout vers le campus. Ses jambes ont tellement l’habitude de prendre cette direction qu’elles semblent avoir pris seules la décision de l’y conduire.

Une espèce de petit jardin botanique se trouve à l’entrée. Oh, il n’y a pas grand-chose : une serre tropicale, un verger et un potager biologiques, un carré de plantes médicinales, une basse-cour, une volière… Pas de quoi soulever l’enthousiasme. Mais assez pour casser la routine.

Dans la serre, le chauffage et les brumisateurs fonctionnent à plein régime. La jeune fille ferme les yeux et offre son visage à la moiteur ambiante. Elle se sent tout à coup très calme.

Quoi qu’elle fasse, le 21 décembre arrivera.

Alea jacta est.

 

Alors que, les yeux toujours fermés, elle s’emplit les poumons du parfum des orchidées, un courant d’air intempestif fait s’envoler ses cheveux : la porte extérieure de la serre vient de s’ouvrir.

Éloïse n’a pas envie d’être dérangée et garde les yeux fermés pour bien montrer son indifférence. Mais bientôt elle sent une présence.

Quelqu’un est là, juste à côté d’elle. Comme si la serre n’était pas assez grande !

Contrariée, elle s’apprête à envoyer promener le gêneur. Mais elle est stoppée net dans son élan par l’éclat du regard qui lui fait face.

Une peau noire, des dents étincelantes : c’est Ambroise qui est devant elle.

Un bref instant, Éloïse reste interdite. Puis, sans réfléchir, indifférente à ce qu’il pourrait penser, elle se jette à son cou. S’accroche à lui comme la naufragée qu’elle s’est senti devenir petit à petit depuis que la recherche du jeune homme est devenue une obsession…

Ambroise ne paraît même pas s’en émouvoir. Ses bras se referment autour d’elle avec le naturel de l’évidence.

« Tu vas m’étouffer, si tu continues ! lâche-t-il tout juste en souriant. »

Éloïse branche ses yeux sur le regard noir de son interlocuteur. Qui est-il exactement ? Que fait-il là ? Pourquoi apparait-il (et disparait-il, surtout !) toujours soudainement ?

« Qui es-tu ? articule-t-elle à voix basse. »

Le sourire du jeune homme s’élargit.

« Je te l’ai dit. Je m’appelle Ambroise.

— Mais qui es-tu exactement ? insiste Éloïse. Que fais-tu ici ? Tu étudies à la fac ? Tu fais partie des messagers ?

— Ça fait beaucoup de questions, se moque son interlocuteur. Je ne crois pas que je vais pouvoir répondre à toutes… »

Éloïse a un sourire gêné.

« Et si tu commençais par répondre à une ? »

À suivre

 

Cette histoire vous plaît ? Vous voulez l’emporter dans votre Kindle ? Téléchargez Les 15 derniers jours sur Amazon. Le texte est au format Kindle et lisible sur n’importe quel ordinateur ou tablette, en téléchargeant l’application Kindle for PC (gratuite) sur Amazon.
Et laissez un commentaire pour dire ce que vous avez aimé 🙂