Vous parler de lui…

Jean Blanchet

Le 31 mai 1913 naissait à Arpheuilles, petit village du Berry, Jean Marie Joseph Blanchet, second fils de Calixte Blanchet et Marie Beigneux.

Aujourd’hui, il aurait cent ans.

Mais qu’a-t-il donc fait pour que je vous parle de lui ?

Rien de particulier, en fait. Rien de plus ni de moins, sans doute, que la plupart des gens. Mais ce Jean-là était mon père.

Il m’a eue sur le tard, quelques petites années avant de prendre sa retraite de facteur. Et ce grand écart qui nous séparait (plus d’un demi-siècle ; au moins deux générations) a forcément compliqué nos relations.

Il était issu d’une époque que je visualisais tellement loin dans le passé qu’à l’âge de 4 ou 5 ans je me souviens lui avoir demandé s’il avait connu les dinosaures… Autant dire que si nous habitions la même planète, nous n’évoluions pas vraiment dans le même monde !

Adolescente, je me suis montrée particulièrement dure vis-à-vis du vieil homme qu’il était déjà, persuadée aussi qu’il n’éprouvait pour moi que de l’indifférence.

C’est depuis le fin fond de l’Afrique noire, au mois de novembre 1988, que j’appris, à l’occasion d’un coup de fil, qu’il était mort et enterré depuis une semaine. Cette nouvelle me fit l’effet d’une claque.

Ce n’est pourtant qu’à mon retour en France, deux mois plus tard, que je compris qui il avait été vraiment, combien il avait été apprécié par ses administrés (il était maire de la petite commune dans laquelle il habitait) et à quel point il était fier de sa petite dernière : moi.

Depuis, je porte le regret de ne pas avoir su l’aimer, de n’avoir vu que les années qui nous séparaient, de ne rien avoir compris

Voilà pourquoi, aujourd’hui, j’avais envie de vous parler de lui.

10 réflexions au sujet de « Vous parler de lui… »

    1. Bonjour Jean-Philippe,

      Merci à toi aussi de ton commentaire. J’espère ne pas avoir appuyé là où ça fait mal. Tu sais, là où se cachent les « j’aurais dû »…
      À bientôt 🙂

      Florence

      1. Bonjour Florence,

        Un témoignage touchant qui rejoint mes réflexions en ce moment.

        Les relations familiales sont les plus complexes et, parfois, douloureuses à gérer. Après tout, nous ne les avons pas choisies et nos parents charrient bien souvent eux aussi un vécu familial qui était loin d’être optimal.

        De plus, il est convenu que les enfants doivent respect à leurs parents. Mais à ma connaissance, rares sont les sociétés où l’inverse est préconisé, de façon saine s’entend. (Je ne parle pas de tout laisser faire.)

        Oui, dur, dur les relations familiales pour presque tout le monde.

        Merci pour ton partage.
        MarieBo Articles récents..Booster votre estime de soi avec votre journal intimeMy Profile

      2. Bonjour MarieBo‚

        Tu as tout à fait raison : rien n’est simple dans les relations familiales. Chacun fait ce qu’il peut avec ce qu’il a (ou croit avoir) et il faut souvent du temps pour que les choses s’apaisent. Du temps que l’on n’a pas toujours.

        Florence

  1. Quel beau texte Florence ! Je savais déjà que nous avions des points communs, dont celui entre autres d’exercer le même métier. Je comprends mieux aussi ton goût pour les biographies et autres récits de vie : sans doute le départ de ton père a-t-il laissé chez toi une grande frustration de ne pas savoir grand chose de lui, de n’avoir pas pris le temps de le questionner sur son histoire et son parcours, de l’écouter, de ne pas lui avoir dit « je t’aime » comme il le méritait… Une frustration que tu compenses sans doute aujourd’hui en permettant aux descendants des vieilles personnes de mieux partager.
    Pour ma part, mon père était plus jeune que le tien, mais il est parti du jour au lendemain à 56 ans (presque mon âge aujourd’hui)… Nous avons passé mes années d’enfance et d’adolescence à nous battre (y compris physiquement). C’est à sa mort que j’ai pris conscience que je ne savais pas grand chose de lui, ni de son histoire. A présent, c’est trop tard !

    1. Bonjour Patricia,

      Tu as tout à fait raison : c’est la mort de mon père, et le fait de réaliser ensuite à quel point l’image que j’avais de lui était erronée, qui m’ont sensibilisée à l’importance de la transmission entre générations tant qu’il en est encore temps. Mon père avait 75 ans lorsqu’il est mort (« il avait fait son temps » me dit alors un ami togolais et cette phrase pleine de bon sens africain m’a beaucoup aidée à ce moment-là) mais son décès était totalement inattendu.
      Vingt-cinq ans ont passé et j’ai toujours des regrets (il faut croire que je me sens vraiment coupable…) mais désormais je peux penser à lui avec tendresse et c’est déjà beaucoup : je crois bien que cela ne m’était jamais arrivé avant !

      Florence

  2. bonsoir Florence,
    ah, cet article me fait bien réfléchir moi aussi! J’ai eu des rapports conflictuels adolescente, avec mon père, depuis nous n’en avons plus reparlé, les choses s’étant tassées, mais dernièrement, je me suis fâchée avec lui suite à des propos blessants qu’il a émis à mon encontre (que j’ai pris comme ça). Nous somme restés fâchés un petit mois, boudant chacun de notre côté, et à sa demande, nous nous sommes réconciliés, mais ce petit intermède m’a permis de réfléchir aux rapports que nous entretenons, et je me suis dit qu’il était grand temps d’avoir le courage de mettre à plat deux/trois choses dont nous n’avons jamais reparlé. Il n’est pas très âgé (65 ans), mais on ne connait pas l’avenir et je ne voudrais pas regretter d’avoir laissé l’occasion passer…
    Merci encore de ce partage.
    Mireille

    1. Bonjour Mireille,

      Si j’ai pu indirectement vous aider à assainir vos relations avec votre père, j’en suis ravie. Pour certaines choses, il faudrait agir comme si nous devions nous-mêmes mourir demain. Même (surtout !) si c’est difficile.
      Je vous souhaite de profiter de votre père encore de longues années 🙂

      Florence

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