Cru, crû, crue, crut, etc.

interrogation

Choisir la bonne orthographe d’homonymes est souvent délicat. D’autant plus lorsque le nombre de versions est élevé.

Dans le genre, la liste que je vous propose aujourd’hui est relativement gratinée !

Des diverses significations de l’adjectif cru aux multiples écritures du verbe croire (ou croître), en passant par les noms communs cru et crue, il y a en effet de quoi faire 🙂

Cru peut signifier qui n’est pas cuit (ex : viande crue, jambon cru), mais aussi désagréable, voire indécent (ex : il s’est exprimé en termes crus) ; qui tranche, en parlant d’une couleur, d’une lumière ou d’une ombre (ex : la lumière crue du midi) ou froid et humide (ex : les matins crus d’automne).

Mais cru est aussi un nom commun, utilisé le plus souvent dans le domaine de la vigne. Ex : ce vin est un grand cru. Il peut également signifier une production personnelle : une recette de mon cru.

Ce même nom commun a sa version féminine, synonyme d’augmentation (notamment de niveau de cours d’eau). Ex : la rivière est en crue.

Enfin, deux verbes se partagent l’honneur d’avoir ce mot comme forme verbale ou comme participe passé : croire et croître. L’un des deux ne porte jamais d’accent circonflexe ; l’autre si. Comment se rappeler lequel ?

Imaginez simplement qu’un accent a poussé sur le verbe qui signifie justement augmenter, se développer… pousser !

Qui l’eut cru? 😉

10 réflexions au sujet de « Cru, crû, crue, crut, etc. »

  1. Merci Florence pour ce rappel utile.
    je suis amenée parfois à dispenser des formations de français écrit à des personnes de nationalité étrangère qui travaillent en France. Je vais garder cet exemple dans mes fiches car il me semble très représentatif de toute la diversité (et la richesse) de la langue française.
    A+
    Patricia

    1. Bonjour Patricia,

      La liste est en effet assez longue. Et encore : je n’ai pas détaillé toutes les conjugaisons des verbes croire et croître ! Je crus, tu crus, il crut…
      Il vaut sans doute mieux commencer les formations avec des exemples plus simples 😉

      Florence

  2. Chère Florence,

    Je vais te répondre avec un petit message de mon cru.

    Heureusement, la rivière sous ma fenêtre est loin d’être en crue mais les petits matins d’octobre commencent effectivement à être crus.

    Les bernaches discutent toute la nuit pour planifier leur départ. Elles font des heures supplémentaires. Antérieurement, l’eussiez-vous cru ?

    Mais trêve de propos, que peut-être, vous n’eussiez pas crus.

    Comme je suis polie, je n’utiliserai pas de termes crus, d’ailleurs Florence, dans ce type d’articles, je t’ai toujours crue.

    Voilà !

    J’ai une petite question pour toi !

    Ici, au Québec, nous faisons une différence entre le futur et le conditionnel.

    Hors donc, sur les blogs franco-français, j’observe une utilisation du conditionnel que j’ai toujours « crue » abusive.

    Par exemple, une Québécoise dirait : «

    Demain, je servirai une salade de carottes crues ».

    Très clair. On sait ce que la dame va servir demain comme salade.

    Sur un blog franco-français, on lira : « Demain, je servirais une salade de carotte crues ».

    En bonne Québécoise que je suis, j’attends le « si ».

    Du style, si j’ai le temps d’aller à l’épicerie, si je reviens du travail assez tôt, si je manque de laitue, etc.

    Alors, Florence, j’attends tes lumières (pas trop crues) sur le sujet !!! 😉

    Amicalement,

    MarieBo
    MarieBo Articles récents..Alerte aux arnaques par courriels frauduleuxMy Profile

    1. Bonjour MarieBo,

      Superbe commentaire ! C’est une excellente illustration de ma liste de (bons ou mauvais) crus 🙂

      Quant à ta question, je n’ai malheureusement qu’une seule réponse à y apporter, à savoir que les Québécois maîtrisent mieux la langue française que les Français… Je remarque aussi très souvent l’erreur dont tu parles. L’ajout d’un « s » au verbe dans ce cas ne se justifie pas, c’est bel et bien une erreur.

      Le genre d’erreur qu’un correcteur orthographique automatique ne détecte jamais. Il faut l’aide d’un œil humain pour ça 🙂

      Ma fille de 15 ans te dirait que c’est plus joli avec un « s », mais je ne pense pas que ce soit une raison suffisante pour supprimer le futur. D’autres y verraient peut-être une expression inconsciente de la peur de l’avenir… On peut plus prosaïquement y voir un problème dans l’apprentissage de la conjugaison 😉

      Florence

  3. Bonjour Florence,

    Merci de me confirmer que le conditionnel n’est pas devenu le nouveau futur, du moins, hors de France. Avec tous ces accents qui ont disparu, allez donc savoir !

    Au Québec, nous prenons aussi plusieurs libertés avec l’ortograf.

    Nous attendons une ascenseur en attendant d’aller prendre une autobus.

    Pour nous assurer de ne pas être en retard, nous consultons un horloge régulièrement.

    Le soir, pour nous détendre, nous regardons un vidéo.

    Problèmes de santé ? Nous nous retrouvons à l’urgence d’une hôpital débordée.

    Et nous allons régulièrement poster une lettre à la malle. (mail)

    Des 2 côtés de l’Atlantique, on se souhaite une bonne après-midi.

    Comme quoi que (hum) la perfection n’est pas de ce monde.

    PS

    Ce serait un bon article à faire : pourquoi les mots qui commencent par une voyelle ou un h aspiré sont portés à changer de sexe ?

    Et qu’est-ce qui est devenu politically correct en France au niveau des anglicismes ?

    1. Bonjour MarieBo,

      C’est intéressant, ce que tu dis, sur les mots qui « changent de sexe » en traversant l’Atlantique… Est-ce que ces changements se font uniquement à l’oral ? Ou est-ce que les dictionnaires québécois indiquent qu’autobus est féminin, horloge masculin, etc. ?
      En ce qui concerne les anglicismes, il est de bon ton en France de dire qu’il faut les éviter… mais on n’y met pas forcément beaucoup d’énergie. Moi la première !
      Et puis, la francisation de ces anglicismes qu’on refuse n’est pas toujours simple. Juste un exemple avec e-mail : à part la traduction littérale « courrier électronique », on a inventé « courriel » et « mèl ».
      Personnellement, j’aime bien « courriel ». Je trouve qu’il sonne bien et puis il m’amuse. Alors, je l’utilise. Mais « mèl », je le trouve ridicule. À mon sens, il tient plus d’une déformation type langage SMS que d’un vrai mot français.
      Cela dit, comme j’aime aussi la langue anglaise, j’ai tendance à utiliser les termes d’origine…
      Tout cela pour dire que chacun fait un peu comme il veut 🙂

      Florence

    1. Re-bonjour,

      En France, c’est assez rare de changer le genre des mots comme ça. En tout cas, c’est une erreur que je vois très peu dans les textes que je corrige.
      Chez vous, c’est peut-être l’influence du neutre anglais qui fait qu’on utilise l’un ou l’autre.

      Florence

  4. Bonjour Florence,

    Merci pour ce rappel bien nécessaire.
    Une petite question sur la fin du texte:
    Pourquoi n’y a-t-il pas d’accent circonflexe sur le « eut » de « Qui l’eut cru? »

    Bonne soirée,
    Isabelle

    1. Bonjour Isabelle,

      Je n’ai pas mis d’accent car il s’agit à mon sens de passé antérieur.
      Dans la fameuse réplique de Chimène, il y en a un car Corneille la fait s’exprimer au conditionnel.
      Mais tout cela se discute 🙂

      Florence

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