« J’ai rencontré mon père »

Vue du pont d'un cargo

Le coup de fil de Marc m’a beaucoup surprise : je ne comprenais pas pourquoi cet homme, que je ne connaissais absolument pas, tenait tant à me féliciter pour mon travail. Jusqu’à ce qu’il m’explique…

Marc a cinquante-deux ans. Enfant, les absences répétées de son père (capitaine dans la marine marchande) auraient pu lui peser ; en fait, c’est l’autorité excessive dont celui-ci faisait preuve qui l’a vraiment marqué. Au point qu’une fois bachelier, Marc a littéralement fui la maison de son enfance, n’y remettant plus les pieds qu’occasionnellement, lorsque son père était en mer.

Les deux hommes ne se sont plus jamais revus.

Un jour, Étienne m’a contactée. Officier de marine en retraite, récemment devenu veuf, il souhaitait mettre son histoire par écrit. Pour son fils. Et pour ses petits-enfants, qu’il n’avait jamais rencontrés, mais dont il suivait le parcours à distance. Il était très fier d’eux, d’ailleurs.

Comme la plupart des gens, Étienne m’avait longuement raconté son enfance et sa jeunesse, mais ne s’était pas étendu outre mesure sur sa vie adulte. Sauf pour raconter son amour de la mer et ses joies de marin. Il avait aussi mentionné ce fils, auquel il regrettait tellement d’avoir consacré trop peu de temps. Sans s’éterniser sur le sujet. Mais j’avais bien senti que la blessure était profonde et c’est à ce fils, Marc, qu’il avait choisi de dédier son récit.

Marc que j’ai au téléphone.

– Mon père m’a envoyé son livre. Je ne pourrai jamais assez vous remercier. Grâce à vous, je l’ai enfin rencontré ! Nous nous sommes revus et nous avons bien l’intention de rattraper le temps perdu. J’ai compris tellement de choses… Vous faites un travail formidable, vous savez ?

Oh, oui, je sais, j’ai un métier fabuleux 🙂

2 réflexions au sujet de « « J’ai rencontré mon père » »

    1. Effectivement. Elle illustre bien tout ce qu’une biographie peut apporter, à son auteur comme à sa famille.
      Qui pourrait prétendre, après cela, qu’une vie « ordinaire » ne vaut pas la peine d’être racontée ?

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